Dans le monde du travail, la frontière entre vie personnelle et obligations professionnelles est parfois délicate à tracer. Une récente décision de la Cour de cassation illustre les conflits potentiels qui peuvent survenir.
Dans cette affaire, deux salariés engagés au sein d’une même entreprise entretenaient une relation amoureuse. L’un était Directeur des Ressources Humaines, l’autre était détentrice de mandats syndicaux et représentante du personnel. Ce n’est qu’au bout de plusieurs années que l’employeur a appris l’existence de cette relation. Il a alors estimé que le Directeur des Ressources Humaines avait manqué à son obligation de loyauté et a pris la décision de le licencier pour faute grave. L’employeur considérait que cette relation était de nature à créer un conflit d’intérêts vis-à-vis des responsabilités du salarié et qu’il était intolérable de lui avoir caché sa situation.
Suite à la contestation du licenciement, la question posée aux juges était donc la suivante : une relation personnelle et intime peut-elle constituer un acte de déloyauté justifiant un licenciement ?
Il est couramment établi qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire, à moins qu’il ne constitue un manquement à une obligation découlant du contrat de travail. En l’espèce, la Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel d’avoir jugé que la relation entre les deux salariés, bien que personnelle et intime, pouvait affecter le bon exercice des fonctions professionnelles du Directeur des Ressources Humaines. Les juges ont relevé que le salarié avait participé activement à la gestion de situations de crise, impliquant des plans sociaux et des mouvements de grève, face à cette même représentante syndicale.
La Cour de cassation a conclu que le salarié aurait dû faire preuve de transparence et informer son employeur du conflit d’intérêts. En gardant le silence, il se rendait coupable d’un acte déloyal justifiant son licenciement.
Cet arrêt met en lumière l’importance de la transparence et de la loyauté dans les relations professionnelles, surtout lorsque des fonctions sensibles et des responsabilités importantes sont en jeu.
Source : Cass. soc., 29 mai 2024, n°22-16.218